L’écureuil n’alla pas très loin. Juste comme Isabelle se penchait pour l’attraper, il revint vers elle et lui sauta dans les bras en tenant entre ses dents une petite châtaigne toute luisante qu’il lui tendit.
« Oh ! Merci, Nois… »
Mais la fillette n’eut pas le loisir de terminer sa phrase. Une petite voix, venant on ne sait d’où, murmurait son prénom :
« Isabelle ! Isabelle ! »
Isabelle regarda de tous côtés mais ne vit rien. La voix poursuivit :
« Isabelle ! Je suis là, n’aie pas peur ! »
Terrorisée, la fillette ne répondit rien, puis se risqua enfin à demander :
« Qui… qui êtes-vous ?
-Je suis la Galipote, tu sais, le monstre horrible dont tout le monde parle. C’est vrai, je suis affreuse, mais je ne suis pas méchante. Tu vois le gros chêne creux, là, tout près ? Je suis cachée à l’intérieur. Je vais sortir. Tu n’auras pas peur ?
-Non, non… Madame… balbutia Isabelle.
-Alors je sors ! »
Malgré les paroles rassurantes de la Galipote, Isabelle ne put réprimer une grimace et un mouvement de recul en la voyant. L’être qui se tenait devant elle ressemblait à un énorme lézard vert portant sur le dos deux ailes de chauve-souris et pourvu d’une tête de griffon au bec acéré.
« Je t’avais prévenue, je ne suis pas belle à voir !
-Oh ! Non, Madame, répondit la fillette que commençait tout de même à rassurer la voix douce du monstre.
-Tu es perdue dans cette immense forêt, n’est-ce pas ?
-Oui, Madame.
-Monte sur mon dos, je vais te ramener chez toi ! »
Non sans un certain dégoût, Isabelle, tenant serré contre elle son petit écureuil, monta à califourchon sur le dos de la Galipote. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, elle se retrouva dans les airs, et l’instant d’après ses pieds touchaient terre dans une prairie, en vue de sa maison.
« Merci, Madame ! » cria-t-elle au monstre en courant vers son logis.
Avant de franchir la porte du jardin, elle se retourna une dernière fois, mais quelle ne fut pas sa surprise : l’horrible créature avait disparu ! A sa place se tenait une très belle dame à la longue chevelure et vêtue d’une robe d’azur constellée d’étoiles scintillantes. La dame adressa à Isabelle un petit signe de la main, lui sourit puis disparut dans un éclair aveuglant.
Isabelle en resta médusée sur place. Ce qu’elle ignorait, c’est que la Galipote était en réalité une bonne fée à qui un sort avait été jeté. L’action charitable qu’elle venait d’accomplir en sauvant Isabelle l’en avait délivrée et lui avait rendu son apparence première.
« Isabelle ! Isabelle ! Mais où étais-tu ? Nous te cherchions partout ! »
La fillette sursauta. C’étaient ses parents qui accouraient vers elle à grands cris.
Elle se jeta dans leurs bras.
« Où étais-tu, Isabelle ? Tu nous as fait une de ces peurs ! » dit sa mère en pleurant.
Isabelle raconta entre deux sanglots, la raison de son escapade dans la forêt, sa crainte que Noisette soit tué ou blessé, le dragon devenu une belle dame et son regret d’avoir fait de la peine à son papa et à sa maman. Elle promit qu’elle ne recommencerait plus.
« Viens à la maison, lui dit son père, essuie tes larmes ! Tout finit bien, c’est l’essentiel, mais ne refais jamais une chose pareille ! Allons, après toutes ces émotions, que dirais-tu d’un bon chocolat chaud ? »
Isabelle sourit au travers de ses pleurs. Tous trois entrèrent dans la maison.
Noisette, lui, durant la discussion, avait sauté des bras d’Isabelle et dévorait avec appétit les gâteaux qui l’attendaient à la fenêtre de la chambre de la fillette.
Isabelle lui a fait promettre de ne plus retourner dans la forêt. Elle a lu dans ses petits yeux qu’il avait compris.
Et la vie a repris son cours tranquille. Isabelle et Noisette sont restés les meilleurs amis du monde et ni l’un ni l’autre n’a trahi sa promesse.
Bien sûr, Isabelle rencontre encore parfois la bonne fée à la robe d’azur, mais seulement dans ses beaux rêves !
Quant à moi, j’ai marché sur la queue d’une souris, et mon conte est fini !
AG
Et quelques jours de :
Amitiés
Alain